Sargassum plasticum

vendredi 30 avril 2010 à 16:31 par Equipe

Après deux semaines d’escale à Cuba, l’équipe Watch the Waste est repartie le 16 avril de Santiago pour rallier les Bermudes. Cette navigation annonce la fin des régimes de vents établis et le retour des systèmes dépressionnaires  dont il faut se méfier, même à ces latitudes.  Prudence et vigilance sont donc de mise pour rallier cet archipel perdu au milieu de l’atlantique rendu célèbre pour ses histoires de dérèglement magnétique et de naufrages.  Cette navigation constitue également l’étape phare de Watch the Waste en traversant la fameuse mer des Sargasses réputée pour concentrer une grande quantité de déchets.

La navigation commence sur les chapeaux de roue, Il faut d’abord s’extirper de la côte cubaine contre vents et courants, les rafales dépassent les 30 nœuds, la mer est formée, nous retrouvons le plaisir du prés et des embruns, la gite est forte, le bateau tape, le taux d’humidité bat des records, vive la voile ! Au bout de 30 heures un peu pénibles, nous passons la pointe Est de Cuba, nous pouvons abattre, faire sécher le bateau et accélérer sur une route quasi directe.

Au lever du jour, alors que nous nous trouvons au milieu des Bahamas, nous apercevons sur l’eau une très grande quantité d’algues. Pas de doute, c’est de la sargassum. Parfois en  gigantesques amas circulaires, d’autres fois en filaments orientés dans le sens du vent, la concentration est impressionnante. Nous tentons de faire un lien entre la présence des algues et les courants avoisinants, difficile à dire, a priori, elle serait plus dense dans les phases de transition.

En fin de matinée, nous remarquons que ces algues ne voyagent pas toujours seules et pendant un quart d’heure les amas de sargassum observés renferment une grande quantité de plastique. Pains de polystyrène, sacs, flacons, bouchons, bidons, couverts,  bouteilles ; le plastique sous toutes ses formes emprisonné dans les algues et condamné à dériver avec elles au gré des vents et des courants. En observant plus précisément à l’étrave du bateau, nous remarquons que les déchets ne se trouvent pas uniquement en surface, et qu’une densité toute aussi impressionnante flotte entre deux eaux,  à quelques mètres de profondeur.  Au bout d’une vingtaine de minutes, les algues et les déchets se font moins nombreux, la mer reprend son apparence naturelle.

Le constat est simple, en moins d’un quart d’heure, nous avons vu plus de déchets en pleine mer qu’au cours de tout notre itinéraire passé.  Cette fois c’est certain, la concentration de déchets est bien au rendez-vous.
Le bateau se transforme alors en véritable observatoire. Nous mettons en service notre chalut avec son filet planctonique, à raison de  deux à trois cession de vingt minutes de chalutage par jour. Des phases d’observation approfondies se succèdent à la proue, le positionnement et le détail des déchets observés y sont minutieusement notés afin d’alimenter notre base de données. Dans le même temps nous poursuivons notre observation de tous les jours, dans la peau du navigateur lambda.

Nous rencontrerons d’autres zones de forte concentration sur le reste de notre parcours. On notera tous de même que les plus grosses quantités détritiques ont plutôt été observées au Sud, à la sortie des Bahamas. Cela dit, les conditions de mer forte des deux derniers jours de navigation ont peut être masqué des quantités toutes aussi importantes que lors des premiers jours.
Nous atteignons la pointe Nord Est des Bermudes dimanche 25 avril au petit matin, la mer et le vent nous offrent un peu de répit, le soleil est au rendez vous et après avoir reçu l’autorisation de radio Bermudes, nous nous engageons dans le chenal de St Georges, unique port d’entrée de l’archipel.

Tout l’équipage semble satisfait de cette navigation, nous avons pu profiter de bonnes conditions météo et les observations effectuées ont été fidèles aux prévisions.  L’équipe est désormais en train de rassembler ses résultats, afin de vous offrir prochainement une vision cartographique du phénomène. Notez que d’autres zones réputées pour leurs déchets sont à suivre, notamment au départ des Bermudes lors de notre transat retour vers les Açores.

Depuis notre arrivée, les dépressions violentes s’enchaînent sur l’archipel et nous subissons actuellement des rafales à 60 nœuds au mouillage de St Georges, espérons que la situation météorologique s’améliore d’ici notre départ !

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