Une transatlantique en chiffres et en déchets…

dimanche 31 janvier 2010 à 23:08 par Equipe

Avec un peu de retard, voici les dernières nouvelles de l’expédition Atlantique de Watch the Waste !
Partis le 7 janvier de Mindelo sur l’île de Sao Vicente au Cap Vert, c’est quinze petits jours plus tard, le 22 janvier, que nous avons retrouvé la terre, de l’autre côté de l’océan. C’est depuis Port Louis, à Saint George, sur l’île de Grenada, que l’équipage trouve enfin le temps d’écrire le récit de cette traversée vers l’ouest.

Nous avons eu la chance de rencontrer des conditions très favorables: les alizés nous ont porté, comme prévu, avec régularité jusqu’à destination. Le vent, oscillant de Nord Est à Est Sud Est est resté autour des 25 noeuds. Seule la mer croisée est venue régulièrement troubler la quiétude de l’embarcation.

Il a donc fallu barrer pendant l’essentiel de cette transatlantique ! Nos pilotes automatiques se laissant trop souvent embarquer et rendant acrobatique toute forme d’activité dans l’habitacle, la barre s’est imposée comme solution pour maintenir un calme relatif dans le carré. Mais à quatre, les quarts de 2 heures ne sont pas trop contraignants. Chacun pouvant pendant 6 heures mener sa vie comme il l’entend: lire, manger, dormir, cuisiner… Le rythme de la vie à bord s’est donc mis au tempo d’une traversée océanique plutôt sportive : une simple question d’endurance !

Parce qu’il serait fastidieux de raconter ici les quelques centaines de manoeuvres effectuées, les grains traversés, les coups de chaud subits et autres pétoles de nuit, soulignons simplement qu’Alcavelis a filé un petit 6 noeuds de moyenne sur l’ensemble de cette transatlantique !

Au large, toujours des déchets…
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Non, Watch the Waste n’a pas encore traversé un continent de déchets. Aucun garbage patch n’a été identifié sur cette première traversée océanique. Mais, le contraire aurait été pour tous une grande surprise ! Néanmoins, au fil des jours, c’est une dizaine d’objets flottants que l’équipage a pu recenser, et ce à plus de 500 milles nautique de toute côte. Là encore, la récolte reste comparable aux précédentes: bouteilles plastiques, polystirène, pot de peinture ou encore couvercles orphelins, autant de traces de l’homme dans un environnement apparemment désertique. Une perle toutefois : le 14 janvier à 16h17, Watch the Waste a croisé une chaussure de basket, en plein milieu de l’ATlantique !

Si chacun peut penser qu’une dizaine de déchets observés sur quinze jours reste un résultat bien maigre, il faut considérer que ces constats n’ont pû être effectués que sur une proportion très symbolique de l’océan. Notre champ d’observation se limite à une vingtaine de mètres autour du bateau. Et il n’est possible d’observer ce qui flotte à la surface de l’eau qu’avec la lumière du jour.

Ces différentes contraintes nous ont poussé à sortir notre calculatrice pour proposer à nos lecteurs, une fois n’est pas coutume, quelques chiffres à prendre avec des pincettes !

Sur une distance totale de 2200 milles, nous avons balayé une surface d’océan de 165km² environ. Si on ne prend en compte que les périodes de jour, où l’observation des déchets est possible, ce chiffre retombe à 83km². L’Atlantique s’étend sur environ 106 millions de km². Après calcul, nous avons donc pû observer 0,00007% du désert océanique ! En extrapolant ce chiffre, si l’on considère que l’on croise une dizaine de déchets sur 0,00007% de l’océan, il devrait être possible de comptabiliser plus de 13 millions d’objets flottants, à la dérive sur l’Atlantique !

Bien que le caractère scientifique de ces données soit très largement discutable, elles constituent un point de repère pour cette première expérience d’observation des déchets transocéanique. Et il ne s’agit ici que des résidus visibles !

Pour ce qui est des micro-particules plastiques, nous avons effectué différents prélèvements planctoniques au fil de la traversée. Les analyses de densité seront faites dès notre retour, et nous pourrons alors proposer des résultats plus fiables.

Les déchets d’à bord !

Cette première expérience de navigation de longue durée a été pour nous l’occasion de nous confronter à nos propres déchets. Vivre à quatre pendant quinze jours sur un espace de quelques mètres carrés implique une reflexion sur la gestion des détritus à bord. Si les résidus organiques peuvent être, sans culpabilité, jetés directement à l’eau, que faire de ce qui constitue aujourd’hui le volume essentiel de notre production détritique: les emballages !

Au fil des jours, les coffres arrières du bateau se sont emplis de ces restes jusqu’à saturation. Les deux derniers sacs poubelles ont donc finit dans un des placards intérieurs, qui n’a, bien sûr, pas manqué de s’ouvrir et de se répandre dans l’habitacle après quelques départs au lof incontrollés ! Quelques jours de plus, et la perpsective de l’envahissement détritque aurait bien pû devenir une réalité ! Au bilan, nous avons généré près de 8kg de déchets d’emballage auxquels il faut associer une douzaine de kilogrammes de verre. Soit 20 kg environ pour une quinzaine à quatre. Rapporté aux 353kg de déchets annuels produits par chaque français (Source:ADEME), notre moyenne est plutôt bonne! Mais il reste intéressant de constater que malgré nos conditions de vie très particulières, nous n’avons pû échapper à cette production détritique, qui caractérise aujourd’hui encore, notre mode de vie.

A ce bilan, il faut ajouter ce que nous n’avons pas sû garder à bord ! Une écoute de spi perdue par 4000 mètres de fond et dont le mousqueton a cédé après un affalage approximatif; et un seau (en plastique!) dont l’anse s’est décrochée en plein remplissage. Cette dernière fortune de mer (si de fortune de mer il s’agit!) a été l’objet d’une tentative échouée de récupération: affalage du spi, et remontée au près sur quelques milles n’auront pas suffit à retrouver notre seau !

Bref, de quoi donner du crédit au principe de l’arroseur arrosé !

Terre en vue !

Après quinze jours où, pour seul horizon, s’étendait tout autour de nous le cercle océanique, la terre est apparue. Tobago et sa côte nord encore sauvage nous ont offert un spectacle mémorable. Des collines abruptes tombant dans l’eau où se concentrent une végétation tropicale luxuriante. Et bien que Colomb n’y ai jamais mis les pieds, à bord, le sentiment d’être dans les pas des découvreurs de l’Amérique !

Mais, très vite, les rêves d’aventures ont perdu de leur superbe et, à peine le pied posé à terre, la réalité du monde contemporain s’est rappelée à nos souvenirs. De gros 4×4, des baraques proposant au visiteur des fish’n chips et autres guest houses jalonnent la côte de Charlotteville. Le tourisme s’est ici imposé comme norme, et ce, en moins de dix ans. Nous ne resterons que quelques jours à Tobago pour reprendre quelques forces et commencer rapidement notre remontée vers le Nord…

Bienvenue dans les Caraïbes !

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