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L’Atlantique à toutes allures!

jeudi 20 mai 2010 à 13:11

Treize jours, c’est le temps qu’il nous aura fallu pour rallier l’île de Faïal, aux Açores ! Les vents portants de la première semaine alliés au courant favorable du Gulf Stream nous ont donné un peu d’avance. Mais les deux jours suivants auront été marqués par une pétole et une belle mer d’huile. Enfin, c’est à la gîte et au près que nous passerons les cinq derniers jours de la traversée.  Bref, lors de ces deux petites semaines hors du temps, nous avons dû jouer avec les systèmes météo à toutes les allures, une vrai transat retour en somme !

Dans ces conditions de mer et de vent variées, l’équipage a eu l’occasion de réaliser des observations aussi nombreuses que variées! Dans la lignée de la traversée de la mer des Sargasses, il ne se passe pas un seul jour sans son lot de débris flottants le long de l’étrave. Le plus souvent, nous rencontrons des particules plastiques de quelques centimètres de diamètre, en état de décomposition, blanchies par leurs séjours dans l’eau salée. Le résultat est impressionnant : nous avons relevé environ dix fois plus de débris plastiques pendant cette transat retour que lors de l’aller! Le courant joue encore une fois son rôle de camion poubelle et charrie malgré lui ces résidus flottants à l’abri des regards, loin de la terre…


Une autre preuve du gigantisme de cet océan, sur près de 2000 milles traversés, nous n’avons aperçu que six bateaux dont cinq thoniers Espagnols ! C’est dire si nous nous sentions bien seuls…

Du froid glacial de la nuit à la douceur toute relative du jour, en dehors de nos quarts, nous ne restions pas beaucoup sur le pont, préférant de loin nos couettes ! La vie a fini par s’organiser tant bien que mal sur Alcavelis, alternant quarts, corvées domestiques, relevés d’échantillons, lecture et sommeil.

Contrairement aux précédentes navigations, nous n’avons pu profiter de poissons frais, la pêche fut bien maigre… Les baleines non plus ne nous ont pas fait le plaisir de nous rendre visite… Heureusement qu’il nous restait les dauphins qui, eux, ont bien répondu présents, ne se lassant pas de jouer sous la coque !

Le treizième jour, terre ! Nous longeons la côte de Faïal avant d’atteindre le port de la Horta en début d’après midi. Nous voici au saint des saints de la voile mondiale, escale incontournable des voiliers reliant l’Europe et ancien haut lieu de la pêche à la baleine ! Pontons exclusivement fréquentés par les navigateurs au long cours, cette escale promet d’être enrichissante à tous point de vue ! Rencontres, échanges et partage de morceaux de vie, voilà ce que nous attendons de ce séjour, apprendre de l’expérience de chacun !

A l’approche de Faïal, envahie par les nuages de basse altitude

Une transatlantique en chiffres et en déchets…

dimanche 31 janvier 2010 à 23:08

Avec un peu de retard, voici les dernières nouvelles de l’expédition Atlantique de Watch the Waste !
Partis le 7 janvier de Mindelo sur l’île de Sao Vicente au Cap Vert, c’est quinze petits jours plus tard, le 22 janvier, que nous avons retrouvé la terre, de l’autre côté de l’océan. C’est depuis Port Louis, à Saint George, sur l’île de Grenada, que l’équipage trouve enfin le temps d’écrire le récit de cette traversée vers l’ouest.

Nous avons eu la chance de rencontrer des conditions très favorables: les alizés nous ont porté, comme prévu, avec régularité jusqu’à destination. Le vent, oscillant de Nord Est à Est Sud Est est resté autour des 25 noeuds. Seule la mer croisée est venue régulièrement troubler la quiétude de l’embarcation.

Il a donc fallu barrer pendant l’essentiel de cette transatlantique ! Nos pilotes automatiques se laissant trop souvent embarquer et rendant acrobatique toute forme d’activité dans l’habitacle, la barre s’est imposée comme solution pour maintenir un calme relatif dans le carré. Mais à quatre, les quarts de 2 heures ne sont pas trop contraignants. Chacun pouvant pendant 6 heures mener sa vie comme il l’entend: lire, manger, dormir, cuisiner… Le rythme de la vie à bord s’est donc mis au tempo d’une traversée océanique plutôt sportive : une simple question d’endurance !

Parce qu’il serait fastidieux de raconter ici les quelques centaines de manoeuvres effectuées, les grains traversés, les coups de chaud subits et autres pétoles de nuit, soulignons simplement qu’Alcavelis a filé un petit 6 noeuds de moyenne sur l’ensemble de cette transatlantique !

Au large, toujours des déchets…
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Non, Watch the Waste n’a pas encore traversé un continent de déchets. Aucun garbage patch n’a été identifié sur cette première traversée océanique. Mais, le contraire aurait été pour tous une grande surprise ! Néanmoins, au fil des jours, c’est une dizaine d’objets flottants que l’équipage a pu recenser, et ce à plus de 500 milles nautique de toute côte. Là encore, la récolte reste comparable aux précédentes: bouteilles plastiques, polystirène, pot de peinture ou encore couvercles orphelins, autant de traces de l’homme dans un environnement apparemment désertique. Une perle toutefois : le 14 janvier à 16h17, Watch the Waste a croisé une chaussure de basket, en plein milieu de l’ATlantique !

Si chacun peut penser qu’une dizaine de déchets observés sur quinze jours reste un résultat bien maigre, il faut considérer que ces constats n’ont pû être effectués que sur une proportion très symbolique de l’océan. Notre champ d’observation se limite à une vingtaine de mètres autour du bateau. Et il n’est possible d’observer ce qui flotte à la surface de l’eau qu’avec la lumière du jour.

Ces différentes contraintes nous ont poussé à sortir notre calculatrice pour proposer à nos lecteurs, une fois n’est pas coutume, quelques chiffres à prendre avec des pincettes !

Sur une distance totale de 2200 milles, nous avons balayé une surface d’océan de 165km² environ. Si on ne prend en compte que les périodes de jour, où l’observation des déchets est possible, ce chiffre retombe à 83km². L’Atlantique s’étend sur environ 106 millions de km². Après calcul, nous avons donc pû observer 0,00007% du désert océanique ! En extrapolant ce chiffre, si l’on considère que l’on croise une dizaine de déchets sur 0,00007% de l’océan, il devrait être possible de comptabiliser plus de 13 millions d’objets flottants, à la dérive sur l’Atlantique !

Bien que le caractère scientifique de ces données soit très largement discutable, elles constituent un point de repère pour cette première expérience d’observation des déchets transocéanique. Et il ne s’agit ici que des résidus visibles !

Pour ce qui est des micro-particules plastiques, nous avons effectué différents prélèvements planctoniques au fil de la traversée. Les analyses de densité seront faites dès notre retour, et nous pourrons alors proposer des résultats plus fiables.

Les déchets d’à bord !

Cette première expérience de navigation de longue durée a été pour nous l’occasion de nous confronter à nos propres déchets. Vivre à quatre pendant quinze jours sur un espace de quelques mètres carrés implique une reflexion sur la gestion des détritus à bord. Si les résidus organiques peuvent être, sans culpabilité, jetés directement à l’eau, que faire de ce qui constitue aujourd’hui le volume essentiel de notre production détritique: les emballages !

Au fil des jours, les coffres arrières du bateau se sont emplis de ces restes jusqu’à saturation. Les deux derniers sacs poubelles ont donc finit dans un des placards intérieurs, qui n’a, bien sûr, pas manqué de s’ouvrir et de se répandre dans l’habitacle après quelques départs au lof incontrollés ! Quelques jours de plus, et la perpsective de l’envahissement détritque aurait bien pû devenir une réalité ! Au bilan, nous avons généré près de 8kg de déchets d’emballage auxquels il faut associer une douzaine de kilogrammes de verre. Soit 20 kg environ pour une quinzaine à quatre. Rapporté aux 353kg de déchets annuels produits par chaque français (Source:ADEME), notre moyenne est plutôt bonne! Mais il reste intéressant de constater que malgré nos conditions de vie très particulières, nous n’avons pû échapper à cette production détritique, qui caractérise aujourd’hui encore, notre mode de vie.

A ce bilan, il faut ajouter ce que nous n’avons pas sû garder à bord ! Une écoute de spi perdue par 4000 mètres de fond et dont le mousqueton a cédé après un affalage approximatif; et un seau (en plastique!) dont l’anse s’est décrochée en plein remplissage. Cette dernière fortune de mer (si de fortune de mer il s’agit!) a été l’objet d’une tentative échouée de récupération: affalage du spi, et remontée au près sur quelques milles n’auront pas suffit à retrouver notre seau !

Bref, de quoi donner du crédit au principe de l’arroseur arrosé !

Terre en vue !

Après quinze jours où, pour seul horizon, s’étendait tout autour de nous le cercle océanique, la terre est apparue. Tobago et sa côte nord encore sauvage nous ont offert un spectacle mémorable. Des collines abruptes tombant dans l’eau où se concentrent une végétation tropicale luxuriante. Et bien que Colomb n’y ai jamais mis les pieds, à bord, le sentiment d’être dans les pas des découvreurs de l’Amérique !

Mais, très vite, les rêves d’aventures ont perdu de leur superbe et, à peine le pied posé à terre, la réalité du monde contemporain s’est rappelée à nos souvenirs. De gros 4×4, des baraques proposant au visiteur des fish’n chips et autres guest houses jalonnent la côte de Charlotteville. Le tourisme s’est ici imposé comme norme, et ce, en moins de dix ans. Nous ne resterons que quelques jours à Tobago pour reprendre quelques forces et commencer rapidement notre remontée vers le Nord…

Bienvenue dans les Caraïbes !

A l’ouest du Cap Vert…

mercredi 06 janvier 2010 à 17:15

Comme nos lecteurs les plus fidèles l’auront compris, cette escale au Cap Vert aura été l’occasion pour l’équipe de Watch the Waste de recharger les batteries ! Un petit moment de répit avant d’entrer dans le vif du sujet.

Pendant une quinzaine de jours, Alacavelis a silloné les mers qui séparent les îles Barlavento. Ici, c’est le nom qui est donné aux îles “au vent”, celles qui sont traversées pendant de longs mois par les Alizés. Mais, cette année, les vents ont été particulièrement calmes, ce qui n’a pas réjoui tout le monde !
En effet, la première île visitée fût Sal, qui oriente son économie exclusivement vers le tourisme. Chaque année, des milliers d’amateurs de sensations fortes viennent fouler la plage de Santa Maria à la conquête d’une “des plus belles droites du monde”… Des loueurs de surfs et de kytes jalonnent les bâtiments des hotels fraichement dressés sur l’île qui, jusqu’à il y a peu, était le point de passage obligé de tous les vols internationaux desservant le Cap Vert.
Faute de vent et peut-être aussi parce que le tourisme de masse n’est décidemment pas une activité prisée à bord, l’équipage est parti à la conquête de la plage orientale de l’île, la Serra Negra, devenue une véritable décharge littorale.


A l’est de Sal, les courants et les vents viennent charrier des résidus qui s’amoncellent aux pieds d’une décharge à ciel ouvert.

Sur ce site, s’amoncellent, entre autres, les restes des matériaux ayant permis la construction des hotels décrits plus tôt. Ironie du sort, cette plage est tacitement interdite à la baignade car elle est le lieu de reproduction privilégié des tortues marines locales…


C’est ensuite vers Sao Nicolau que nous avons continué ce périple, toujours plus à l’ouest. Bien qu’en plein coeur de l’archipel, elle en est peut-être aujourd’hui une des îles les plus isolées. Territoire préservé des vagues massives de vacanciers, c’est ici que l’équipe a compris le pourquoi du “vert”, dans le nom donné à l’archipel. Une fois passées les colines arides de Tarrafal, le visiteur se retrouve dans un paysage où la végétation abonde. Des vallées et des sommets vertigineux se succèdent sous nos yeux. Ici, la richesse des sols est à associer à la richesse des coeurs: la Morabeza, l’art de vivre, d’être et d’accueillir à la capverdienne est toujours une réalité. Chacun semble conscient des limites des eldorados touristiques. Et même si on y aspire forcément un peu, les habitants semblent, comme nous, vouloir profiter des quelques années qui séparent encore Sao Nicolau d’un développement que nul de saurait réfreiner.

Tarafal, Sao Nicolau, à quelques heures du réveillon de Noël

Au fil de son parcours entre les îles Barlavento, l’équipe a réalisé les premiers prélèvements planctoniques de l’expédition. Les essais du Manta Trawl, prêté par l’Algalita Marine Research Foundation sont concluants. Le bateau parvient, sans trop être freiné, à tirer derrière lui cette bouche béante qui retient dans son filet toutes les particules en flotaison. Nous observons à l’oeil nu des résidus plastiques, sous forme de petits filaments colorés. Tout cela promet pour les mois à venir!

Premiers essais in situ du Manta Trawl.

L’arrivée à Sao Vicente marque la fin de cette escale capverdienne. Mindelo sera le point de départ de la transat’ aller. Chacun tente de profiter au mieux de la terre que nous allons quitter pour quelque temps. Juste en face, Santo Antao sera la dernière silhouette terrestre que nous pourrons admirer en faisant route vers le continent américain. Et quelle silhouette !

Les sommets de Santo Antao, dernière images de la terre avant l’océan…

L’heure est donc venue pour l’équipage de retrouver le large. Depuis quelques jours, nous nous affairons pour préparer notre embarcation à cette longue traversée. Départ prévu demain, jeudi. En route vers l’ouest ! Il ne faudra pas moins de 15 jours de mer pour rejoindre l’île de Tobago. D’ici là, nos nouvelles seront rares… Mais vous pourrez suivre notre parcours grace à la cartographie en temps réel.

Et, en attendant de vous retrouver, tous les membres de l’équipe vous souhaitent une excellente année !

A très vite (ou presque) pour la suite !

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