Quand la croisière amuse

jeudi 25 février 2010 à 17:22 par yann

Le phénomène à commencé aux Canaries. Au couché du soleil, le gigantesque quai à coté du mouillage d’Alcavelis est vide. Le lendemain matin, un véritable immeuble flottant y est amarré, déversant son flot de touristes le temps d’une journée pour repartir à la tombée de la nuit. La croisière en paquebot connait des adeptes depuis longtemps mais ces vingt dernières années, cette nouvelle forme de tourisme de masse s’est largement popularisée, dépassant les 10% de croissance annuelle. Et devinez quelle est la destination la plus prisée par les croisiéristes… Les Caraïbes bien sur.

Paquebot a quai

Au cours des escales de l’équipe Watch the Waste entre Grenade et la Dominique, ce n’est plus un paquebot par semaine en escale mais plutôt un à deux par jours! Véritable villes flottantes, les paquebots en question atteignent dorénavant des dimensions titanesques, près de 300m de long, plus d’une quinzaine de ponts pour accueillir 2500 à 3000 passagers, seul le dépaysement connait une limite: centre commercial, casino, salle de spectacle, cinémas, piscines, spas. Tous les moyens de consommation sont là pour que le client dépense ses euros-dollars à bord! Le prix du séjour oscille entre 600 euros par passager pour une cabine intérieure à plus de 3000 euros pour une suite avec balcon et vue sur mer… si le navire accoste du bon coté. Le principe séduit actuellement près de 15 million de personnes, d’abord américains, le vieux continent est encore un peu à la traîne.

L’impact économique sur les lieux d’escale des paquebots est malheureusement bien inégal. Lorsque l’un d’entre nous demande à un chauffeur de taxi si le travail est là, il acquiesce vivement en nous annonçant que deux paquebots sont attendus demain. L’affaire est tout aussi profitable pour les agences de location de voitures, pour les guides touristiques et les échoppes de souvenirs; quand un paquebot vient, tout va! Malheureusement, la restauration et les commerces ne ramassent que les miettes, les escales ne durent que dix petites heures, tout ce qui peut se vendre à bord doit être acheté à bord.
L’image du touriste n’en sort pas non plus indemne. Pas étonnant que lorsqu’on voyage dans de tels pays, nous soyons considérés comme des cartes de crédit ambulantes quand près de 6000 personnes par jours font le tour de l’ile en quelques heures. Comment peut-on se réjouir d’un instant aussi éphémère sur une ile aussi riche que la Dominique? « J’ai fait la Dominique » annonceront-ils à leurs amis… Ce type de tourisme « Disney » a quelque chose de méprisant pour la population d’un pays, son essor tend à l’uniformiser jusqu’à rendre les formes de tourisme plus traditionnelles de plus en plus inaccessibles.

Les perspectives économiques d’un paquebot en escale sont telles que les iles se précipitent dans la construction de quais géants pour accueillir ces mastodontes, sans pour autant prévoir les infrastructures annexes.

L’environnement en est encore une fois la première victime. Inutile de préciser que de tous les navires, les paquebots sont ceux qui rejettent le plus d’eaux noires (issues des toilettes), d’eaux grises (douches et lavabo) et de déchets solides (estimés à 20 tonnes par jour!). Comment des iles de moins de 100 000 habitants peuvent prétendre recevoir une telle quantité de déchets quotidiennement? Cela ne laisse que peu de doute sur leur destiné.

Les émissions de gaz constituent un problème tout aussi alarmant. La consommation énergétique des équipements à bord d’un paquebot est telle qu’aucun port d’escale ne peut prétendre fournir la puissance électrique nécessaire. Ne pouvant se « brancher », le navire à quai doit donc continuer à produire sa propre énergie à l’aide de ses génératrices diesel fonctionnant au fuel lourd. Comme les quais sont le plus souvent au cœur des villes pour des raisons pratiques, les habitants ont la chance de respirer des taux de NOx bien supérieurs à la moyenne!

Malgré cela, les trois géants du « cruise business » que sont Carnival, Royal Caribbean et Star Cruises sont passés entre les griffes de Copenhague. Certains annoncent des progrès environnementaux pour soigner leur image. Avec des chiffres d’affaires avoisinant les 15 milliards de dollars, leurs projets de paquebots toujours plus grands, toujours plus fous, ne craignent pas la crise… Tant que la croisière amuse !

Un carnaval à méditer?

mercredi 24 février 2010 à 18:46 par Equipe

Après quatre mois d’expédition, Watch the Waste est de retour en France! Mais ce bout de France là ne ressemble à aucun autre, surtout lorsque l’on y accoste pendant les jours gras: à la Martinique, entre le dimanche qui le précède et le mercredi des cendres, c’est Kawnawal!
Bon gré, mal gré, l’équipe de Watch the Waste découvre en arrivant au Marin, une île en pleine effervescence, où chacun semble n’avoir qu’un mot à la bouche… Le carnaval est ici une véritable fête nationale dans laquelle la plupart des martiniquais semblent s’investir corps et âme! Un indice de cette ferveur populaire: tous les commerces de l’île ferment à midi pendant toute la durée du carnaval!


Les diables rouges sont de sortie! C’est Mardi-gras à Fort de France!

Mais, cette année, le carnaval avait des raisons de remporter un succès populaire inégalé: l’année dernière, les grêves contre la ‘pwofitation’, avaient bloqué l’organisation de ces festivités. Aussi, en 2010, tout le monde attendait avec impatience les jour gras du mois de février.
Les festivités commencent dans l’île dès le mois de janvier: élection des reines (une par village), petits spectacles burlesques et autres foires. Mais c’est tout au long de l’année que chacun travaille au point culminant de la fête pendant les 4 jour gras du carnaval: fabrication des chars ou confection des costumes pour les danseuses et les musiciens, chaque groupe participant se livre à une compétition sans grand enjeu, si ce n’est celui du plaisir de la fête.
Les origines de ce carnaval remonteraient au prémisces de la colonisation sur l’île. Il se déroulait alors à Saint-Pierre, et a connu se heures de gloire jusqu’à l’éruption de la montagne pelée. La forme actuelle du carnaval est plus récente et apparaît comme un métisage entre culture africaine et carnaval tropical, à l’image de celui de Trinidad ou de Rio.

Pour ce qui est du rite populaire, la fête commence véritablement le dimanche avec la présentation du “vaval”, un mannequin géant, personnage emblématique de la célébration, objet des moqueries constituant le centre de gravité de ces quatre jours d’euphorie. Cet année, le vaval qui représente en général un homme politique ou une célébrité, avait pri la forme d’un gros banquier tenant dans ses mains des liases de billets. Ce jour là, chaque ville et village de la Martinique envoie chars, danseurs et musiciens vers Fort de France où se déroule la grande parade du Carnaval. Le lundi est dédié à l’innversion des sexes et au mariage burlesque: les hommes se travestissent en femme et inversement. Le mardi-gras est le jour de la sortie des “diables-rouges”, véritable symbole du carnaval martiniquais, et jour de l’apogée des festivités. Ceux-ci défilent dans les rues et sont censés effrayer les enfants. Enfin le mercredi, on annonce le matin la mort de Vaval et la ville défile endeuillée de noir et de blanc: au crépuscule on brûle le mannequin pour achever les festivités.

Si nous nous attardons à vous décrire cet événement qui pourrait sembler à certains très éloigné de l’objet de notre périple, c’est tout d’abord qu’une telle ferveur populaire ne saurait laisser qui que ce soit de marbre. Mais plus encore, il nous est apparu que cette célébration mettait en scène quelque chose qui pouvait ressembler à ce que nous traquons sur les mers depuis le début de ce voyage: le déchet. La tradition carnavalesque est depuis toujours associée à une forme de lacher-prise où tout tourne autour de l’excès. Dans la tradition chrétienne, le mardi-gras est un jour d’excès où l’on consomme de la viande avant le jeun du carême.
Les formes plus contemporaines du carnaval perpétuent cette dimension de l’excès et lui donnent corps en général à travers des manifestations publiques. A cette abondance de décors, de couleurs, de gestes, de cris, de chants, le carnaval martiniquais apporte une touche de dérision où les questions politiques sont placées au coeur de la fête. Chacun participe à construire cela même que la manifestation collective va amener à détruire. En effet, Vaval, le personnage clé du carnaval est fêté pendant trois jours, mais, en dernier lieu, ce que l’on célèbre, c’est sa destruction par le feu. De même avec les chars qui seront brûlés à la fin de la fête.

Ce que nous souhaitions souligner ici, c’est le caractère presque vital de ce qui se joue dans les pratiques de mise au rebut. Ce que l’on rejette et que l’on veut voir diparaître définit les frontières d’un extérieur: la communauté se fonde sur ce qu’elle refuse de voir s’insérer en elle. En bref, il y a de la vie dans le déchet et dans les rites qui le mettent en jeu.
En d’autres termes, il n’y a de superflu que dans l’abondance. Le carnaval met en scène cette abondance vécue par tous comme un moment libérateur, peut-être parce que pendant ces quelques jours, ce qui à tout autre moment aurait été vécu comme un pur gaspillage est alors compris par tous comme un acte vital. Par extension, il est possible de considérer l’acte qui fait le déchet comme un geste qui libère, ponctuellement, celui qui jette de ce qui l’encombre. Par ce geste, l’individu marque on appartenance à une communauté, celle des consommateurs. Jeter devenant alors un moyen d’accéder à un statut privilégié, car en effet, ne jette que celui qui a possédé.

En guise de conclusion, revenons-en à des constats plus terre à terre. Un carnaval ne se fait pas sans déchets bien concrets: bouteilles platiques, emballages polistirène pour déjeuners à emporter… et la côte de Fort de France, balayée par les vents d’est s’ouvre à l’ouest sur une baie qui, sans nul doute, aura gardé quelques traces de ces jours d’euphorie nécessaire.

No comment: la transat’ en images…

samedi 20 février 2010 à 15:09 par Equipe

Pour les amateurs de vidéos, voilà avec un peu de retard, un résumé tout en images de la transat du Cap Vert à Tobago

Il y a le ciel, le soleil, la mer… et le tourisme !

samedi 20 février 2010 à 04:59 par Equipe

L’équipe de Watch the Waste remonte depuis bientôt un mois l’arc antillais. Tobago, Grenade, les Grenadines, Saint Vincent, Sainte-Lucie… un chapelet d’île aux noms qui font rêver.
Nous n’avions jamais croisé autant de voiliers que depuis que nous avons atterri dans ce que tout le monde qualifie ici d’un véritable “paradis pour la plaisance”.
Et effectivement, des îles éloignées de 40 milles au plus, un vent établi et plutôt régulier, une mer belle le plus souvent… ajouté à cela les incontournables de la carte-postale, cocotiers et sable fin. Nous y sommes, le paradis n’est plus très loin… ou presque !

De quel paradis parlons-nous? Les caraïbes offrent bel et bien un environnement qui fait rêver dans les rames des métros européens. Les îles constituent ainsi des eldorados pour travailleurs fatigués, en quête de farniente. Et rien de tel que le bateau pour se détendre un peu ! Va pour l’évasion! Mais peut-on seulement en rester à cette image sur papier glacé?

Arrivés à Prickly Bay, au sud de Grenade, le décor est planté. Dans une large baie, des centaines de bateaux sont mouillés. Certains arrivent directement depuis l’autre côté de l’océan, mais l’essentiel est constitué par des yachts de location et autres charters à la semaine. Aussi, mouiller ici, c’est un peu comme chercher à se garer dans un parking de supermarché: les places sont rares et chères !

Aux Grenadines, tout semble fait pour faciliter le quotidien des plaisanciers en congés: “Sail fast, Work less”, un slogan que l’ont peut lire un peu partout. Entre Union Island et Bequia, dans les Grenadines de Saint-Vincent, des boat-boys viennent inlasablement aux abords de chaque embarcation mouillée pour proposer du poisson frais ou des langoustes, que les touristes n’ont pas le droit de pêcher eux-mêmes. Les mêmes proposent des services de laverie, la livraison de pain frais, ou de croissants pour le lendemain matin, sans compter les invitations répétées à essayer les quelques paradis artificiels locaux. Dans les Grenadines donc, plus besoin de sortir faire ses courses, le supermarché vient jusqu’à votre échelle de bain.


Un boat-boy dans les Tobago Cays

Au coeur de cet archipel, les Tobago Cays constituent un point de passage obligé pour tous ceux qui naviguent sur ces mers. Une série de barrières de corail enrobent un lagon aux eaux translucides et protègent une faune d’une grande richesse: toutes sortes de poissons aux couleurs exotiques, tortues, raies, barracudas et autres requins peuplent ces fonds d’une rare beauté. A cette faune aquatique vient se mêler une faune touristique tout aussi dense. Des bateaux par centaines viennent passer une nuit ou deux au coeur de ce joyau aquatique.

Mais, les Tobago Cays sont aujourd’hui une réserve marine. Ce statut oblige tout visiteur à s’acquitter d’un droit d’entrée et ce afin de financer la protection du site. A cette taxe est associée un réglement strict sur la conduite à tenir dans la réserve. Ainsi, malgré le nombre gigantesque de visiteurs pour un espace si retreint, le tourisme semble, ici, participer à une forme de protection du patrimoine naturel local. Ce constat de propreté peut même être généralisé à la plupart des sites rencontrés sur notre parcours…  Comment expliquer que malgré cette fréquentation intensive, ces îles demeurent le plus souvent d’une propreté exemplaire?

Le touriste rend-il propre?
Pendant nos formalités d’entrée à Grenade, un message est répété par le fonctionnaire en poste: ici, on ne plaisante pas avec les pollutions. Des questions nous sont posées sur notre caisse à eau noire et sur nos pratiques à bord: la question des déchets est prise ici très au sérieux. Et pour cause, il ne faudrait pas gâcher la carte postale!
En quelques décennies, le tourisme est devenu pour l’ensemble de l’espace carribéen la ressource économique principale. Aujourd’hui, l’ensemble de ces pays est dépendant des flux touristiques saisonniers, et rien ne semble en passe de changer: le développement d’infratructures de transport ou l’omniprésence des boat-boys sont autant d’indices de l’avènement d’une monoéconomie dédiée aux loisirs et à la détente pour occidentaux de tous horizons.
Et, cette évolution n’est pas perçue comme négative. A propos de déchets notamment, beaucoup de ceux qui ont vu ces îles avant l’arrivée massives des bateaux de croisières et autres charters estivaux ne peuvent que constater une amélioration évidente de l’hygiène publique. Du moins, d’un point de vue esthétique et pour les espaces fréquentés quotidiennement par ces flux touristiques.

Car, en effet, si la vitrine est impécable, que dire de l’arrière boutique? Dans la plupart des îles croisées sur notre parcours, il n’existe pas de véritable sytème global de gestion des rebuts. Tantôt simple stockage, souvent un peu d’incinération à l’air libre. Les flux touristiques s’accompagnent de flux de marchandises importants. Or, en l’absence de solutions de gestion industrielle des volumes détritiques engendrés par cette économie des loisirs, comment considérer l’apparente propreté des espaces publics rencontrés? Dans de nombreux endroit croisés, dès que le visiteur quitte de quelques centaines de mètres les espaces dédiés à l’accueil des touristes, la rue est jonchée de cadavres de bouteilles et autres restes de ‘take away’ vite mangés, vite jetés. On raconte que certains boat-boys jeteraient directement à la mer le ordure confiés non sans pourboires par des plaisancier pressés: choisissant la côte Atlantique comme décharge naturelle, laissant le travail aux vents et aux courants. Dans l’univers du déchet dans les caraïbes, il semble donc y avoir deux planètes qui ne sont pas censées se rencontrer. Ainsi,  à savoir si le tourisme demeure un vecteur d’amélioration du cadre de vie des insulaires, la question doit rester ouverte. 

A cette question laissée en suspens répond une autre interrogation: est-il seulement possible de vivre dans le paradis des autres?

Une affaire à suivre !

Une nouvelle robe pour notre observatoire

dimanche 31 janvier 2010 à 23:10 par Equipe

Après tous ces milles parcourus depuis le départ, la carène d’Alcavelis s’est un peu usée, il est temps de remettre une couche d’antifouling. Cette peinture permet d’éviter que la carène soit souillée par les organismes marins. Le problème, c’est que ce produit présente une toxicité importante et les carénages peuvent représenter un danger pour l’environnement lorsque les résidus d’antifouling ne sont pas récupérés. En France, ces carénages « sauvages » sont théoriquement interdits mais devant l’investissement que représentent les systèmes de récupérations des eaux, la réglementation n’est pas partout respectée. Inutile de préciser qu’en descendant vers le sud, Alcavelis n’a croisé aucun chantier équipé comme tel, jusqu’à maintenant, au sud des Antilles à Grenade et Cariacou. Nous espérons revoir d’autre chantier soucieux de leur environnement en remontant vers le Nord.
Alcavelis est donc passé en arrêt technique au chantier au sud de Grenade. Lavage haute pression, ponçage, application de la première couche d’antifouling, puis de la deuxième, l’équipe « «Watch the Waste » s’adonne aux travaux manuels pendant deux jours complets. Nous profitons aussi de cette sortie pour déposer nos voiles et les faire renforcer aux points sensibles, et pour régler des petites bricoles. Arrêt éclair donc, à mi-parcours, Alcavelis à troqué son vieil habit noire contre une robe rouge toute neuve.

Une transatlantique en chiffres et en déchets…

dimanche 31 janvier 2010 à 23:08 par Equipe

Avec un peu de retard, voici les dernières nouvelles de l’expédition Atlantique de Watch the Waste !
Partis le 7 janvier de Mindelo sur l’île de Sao Vicente au Cap Vert, c’est quinze petits jours plus tard, le 22 janvier, que nous avons retrouvé la terre, de l’autre côté de l’océan. C’est depuis Port Louis, à Saint George, sur l’île de Grenada, que l’équipage trouve enfin le temps d’écrire le récit de cette traversée vers l’ouest.

Nous avons eu la chance de rencontrer des conditions très favorables: les alizés nous ont porté, comme prévu, avec régularité jusqu’à destination. Le vent, oscillant de Nord Est à Est Sud Est est resté autour des 25 noeuds. Seule la mer croisée est venue régulièrement troubler la quiétude de l’embarcation.

Il a donc fallu barrer pendant l’essentiel de cette transatlantique ! Nos pilotes automatiques se laissant trop souvent embarquer et rendant acrobatique toute forme d’activité dans l’habitacle, la barre s’est imposée comme solution pour maintenir un calme relatif dans le carré. Mais à quatre, les quarts de 2 heures ne sont pas trop contraignants. Chacun pouvant pendant 6 heures mener sa vie comme il l’entend: lire, manger, dormir, cuisiner… Le rythme de la vie à bord s’est donc mis au tempo d’une traversée océanique plutôt sportive : une simple question d’endurance !

Parce qu’il serait fastidieux de raconter ici les quelques centaines de manoeuvres effectuées, les grains traversés, les coups de chaud subits et autres pétoles de nuit, soulignons simplement qu’Alcavelis a filé un petit 6 noeuds de moyenne sur l’ensemble de cette transatlantique !

Au large, toujours des déchets…
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Non, Watch the Waste n’a pas encore traversé un continent de déchets. Aucun garbage patch n’a été identifié sur cette première traversée océanique. Mais, le contraire aurait été pour tous une grande surprise ! Néanmoins, au fil des jours, c’est une dizaine d’objets flottants que l’équipage a pu recenser, et ce à plus de 500 milles nautique de toute côte. Là encore, la récolte reste comparable aux précédentes: bouteilles plastiques, polystirène, pot de peinture ou encore couvercles orphelins, autant de traces de l’homme dans un environnement apparemment désertique. Une perle toutefois : le 14 janvier à 16h17, Watch the Waste a croisé une chaussure de basket, en plein milieu de l’ATlantique !

Si chacun peut penser qu’une dizaine de déchets observés sur quinze jours reste un résultat bien maigre, il faut considérer que ces constats n’ont pû être effectués que sur une proportion très symbolique de l’océan. Notre champ d’observation se limite à une vingtaine de mètres autour du bateau. Et il n’est possible d’observer ce qui flotte à la surface de l’eau qu’avec la lumière du jour.

Ces différentes contraintes nous ont poussé à sortir notre calculatrice pour proposer à nos lecteurs, une fois n’est pas coutume, quelques chiffres à prendre avec des pincettes !

Sur une distance totale de 2200 milles, nous avons balayé une surface d’océan de 165km² environ. Si on ne prend en compte que les périodes de jour, où l’observation des déchets est possible, ce chiffre retombe à 83km². L’Atlantique s’étend sur environ 106 millions de km². Après calcul, nous avons donc pû observer 0,00007% du désert océanique ! En extrapolant ce chiffre, si l’on considère que l’on croise une dizaine de déchets sur 0,00007% de l’océan, il devrait être possible de comptabiliser plus de 13 millions d’objets flottants, à la dérive sur l’Atlantique !

Bien que le caractère scientifique de ces données soit très largement discutable, elles constituent un point de repère pour cette première expérience d’observation des déchets transocéanique. Et il ne s’agit ici que des résidus visibles !

Pour ce qui est des micro-particules plastiques, nous avons effectué différents prélèvements planctoniques au fil de la traversée. Les analyses de densité seront faites dès notre retour, et nous pourrons alors proposer des résultats plus fiables.

Les déchets d’à bord !

Cette première expérience de navigation de longue durée a été pour nous l’occasion de nous confronter à nos propres déchets. Vivre à quatre pendant quinze jours sur un espace de quelques mètres carrés implique une reflexion sur la gestion des détritus à bord. Si les résidus organiques peuvent être, sans culpabilité, jetés directement à l’eau, que faire de ce qui constitue aujourd’hui le volume essentiel de notre production détritique: les emballages !

Au fil des jours, les coffres arrières du bateau se sont emplis de ces restes jusqu’à saturation. Les deux derniers sacs poubelles ont donc finit dans un des placards intérieurs, qui n’a, bien sûr, pas manqué de s’ouvrir et de se répandre dans l’habitacle après quelques départs au lof incontrollés ! Quelques jours de plus, et la perpsective de l’envahissement détritque aurait bien pû devenir une réalité ! Au bilan, nous avons généré près de 8kg de déchets d’emballage auxquels il faut associer une douzaine de kilogrammes de verre. Soit 20 kg environ pour une quinzaine à quatre. Rapporté aux 353kg de déchets annuels produits par chaque français (Source:ADEME), notre moyenne est plutôt bonne! Mais il reste intéressant de constater que malgré nos conditions de vie très particulières, nous n’avons pû échapper à cette production détritique, qui caractérise aujourd’hui encore, notre mode de vie.

A ce bilan, il faut ajouter ce que nous n’avons pas sû garder à bord ! Une écoute de spi perdue par 4000 mètres de fond et dont le mousqueton a cédé après un affalage approximatif; et un seau (en plastique!) dont l’anse s’est décrochée en plein remplissage. Cette dernière fortune de mer (si de fortune de mer il s’agit!) a été l’objet d’une tentative échouée de récupération: affalage du spi, et remontée au près sur quelques milles n’auront pas suffit à retrouver notre seau !

Bref, de quoi donner du crédit au principe de l’arroseur arrosé !

Terre en vue !

Après quinze jours où, pour seul horizon, s’étendait tout autour de nous le cercle océanique, la terre est apparue. Tobago et sa côte nord encore sauvage nous ont offert un spectacle mémorable. Des collines abruptes tombant dans l’eau où se concentrent une végétation tropicale luxuriante. Et bien que Colomb n’y ai jamais mis les pieds, à bord, le sentiment d’être dans les pas des découvreurs de l’Amérique !

Mais, très vite, les rêves d’aventures ont perdu de leur superbe et, à peine le pied posé à terre, la réalité du monde contemporain s’est rappelée à nos souvenirs. De gros 4×4, des baraques proposant au visiteur des fish’n chips et autres guest houses jalonnent la côte de Charlotteville. Le tourisme s’est ici imposé comme norme, et ce, en moins de dix ans. Nous ne resterons que quelques jours à Tobago pour reprendre quelques forces et commencer rapidement notre remontée vers le Nord…

Bienvenue dans les Caraïbes !

A l’ouest du Cap Vert…

mercredi 06 janvier 2010 à 17:15 par Equipe

Comme nos lecteurs les plus fidèles l’auront compris, cette escale au Cap Vert aura été l’occasion pour l’équipe de Watch the Waste de recharger les batteries ! Un petit moment de répit avant d’entrer dans le vif du sujet.

Pendant une quinzaine de jours, Alacavelis a silloné les mers qui séparent les îles Barlavento. Ici, c’est le nom qui est donné aux îles “au vent”, celles qui sont traversées pendant de longs mois par les Alizés. Mais, cette année, les vents ont été particulièrement calmes, ce qui n’a pas réjoui tout le monde !
En effet, la première île visitée fût Sal, qui oriente son économie exclusivement vers le tourisme. Chaque année, des milliers d’amateurs de sensations fortes viennent fouler la plage de Santa Maria à la conquête d’une “des plus belles droites du monde”… Des loueurs de surfs et de kytes jalonnent les bâtiments des hotels fraichement dressés sur l’île qui, jusqu’à il y a peu, était le point de passage obligé de tous les vols internationaux desservant le Cap Vert.
Faute de vent et peut-être aussi parce que le tourisme de masse n’est décidemment pas une activité prisée à bord, l’équipage est parti à la conquête de la plage orientale de l’île, la Serra Negra, devenue une véritable décharge littorale.


A l’est de Sal, les courants et les vents viennent charrier des résidus qui s’amoncellent aux pieds d’une décharge à ciel ouvert.

Sur ce site, s’amoncellent, entre autres, les restes des matériaux ayant permis la construction des hotels décrits plus tôt. Ironie du sort, cette plage est tacitement interdite à la baignade car elle est le lieu de reproduction privilégié des tortues marines locales…


C’est ensuite vers Sao Nicolau que nous avons continué ce périple, toujours plus à l’ouest. Bien qu’en plein coeur de l’archipel, elle en est peut-être aujourd’hui une des îles les plus isolées. Territoire préservé des vagues massives de vacanciers, c’est ici que l’équipe a compris le pourquoi du “vert”, dans le nom donné à l’archipel. Une fois passées les colines arides de Tarrafal, le visiteur se retrouve dans un paysage où la végétation abonde. Des vallées et des sommets vertigineux se succèdent sous nos yeux. Ici, la richesse des sols est à associer à la richesse des coeurs: la Morabeza, l’art de vivre, d’être et d’accueillir à la capverdienne est toujours une réalité. Chacun semble conscient des limites des eldorados touristiques. Et même si on y aspire forcément un peu, les habitants semblent, comme nous, vouloir profiter des quelques années qui séparent encore Sao Nicolau d’un développement que nul de saurait réfreiner.

Tarafal, Sao Nicolau, à quelques heures du réveillon de Noël

Au fil de son parcours entre les îles Barlavento, l’équipe a réalisé les premiers prélèvements planctoniques de l’expédition. Les essais du Manta Trawl, prêté par l’Algalita Marine Research Foundation sont concluants. Le bateau parvient, sans trop être freiné, à tirer derrière lui cette bouche béante qui retient dans son filet toutes les particules en flotaison. Nous observons à l’oeil nu des résidus plastiques, sous forme de petits filaments colorés. Tout cela promet pour les mois à venir!

Premiers essais in situ du Manta Trawl.

L’arrivée à Sao Vicente marque la fin de cette escale capverdienne. Mindelo sera le point de départ de la transat’ aller. Chacun tente de profiter au mieux de la terre que nous allons quitter pour quelque temps. Juste en face, Santo Antao sera la dernière silhouette terrestre que nous pourrons admirer en faisant route vers le continent américain. Et quelle silhouette !

Les sommets de Santo Antao, dernière images de la terre avant l’océan…

L’heure est donc venue pour l’équipage de retrouver le large. Depuis quelques jours, nous nous affairons pour préparer notre embarcation à cette longue traversée. Départ prévu demain, jeudi. En route vers l’ouest ! Il ne faudra pas moins de 15 jours de mer pour rejoindre l’île de Tobago. D’ici là, nos nouvelles seront rares… Mais vous pourrez suivre notre parcours grace à la cartographie en temps réel.

Et, en attendant de vous retrouver, tous les membres de l’équipe vous souhaitent une excellente année !

A très vite (ou presque) pour la suite !

Boas Festas !

vendredi 01 janvier 2010 à 20:15 par Equipe

Un petit mot pour donner quelques nouvelles de l’équipe de Watch the Waste, après bientôt deux semaines au Cap Vert !

Ici, les connexions internet sont rares, et la mise a jour du site a pris du retard… mais nous tacherons très vite de vous proposer un résumé de notre traversée du Cap Vert au Cap Vert ! Et bientôt les images de notre passage inoubliable sur les îles de la Morabeza !

Arrivés quelques jours avant Noël dans cet archipel étonnant, l’équipage s’est laissé prendre au rythme nonchalant de la vie capverdienne. Alcavelis a d’abord posé l’ancre à Palmeira, sur l’île de Sal, pour rejoindre ensuite Santa Maria. Noël a été fêté comme il se doit, sur l’île de Sao Nicolau. Mais c’est depuis Mindelo sur Sao Vicente que nous vous écrivons ces quelques lignes, au lendemain d’un réveillon haut en couleurs, festif et dansant: nous nous sommes mélés à la célébration d’une nouvelle année qui promet encore beaucoup de surprises. L’équipe s’accorde encore quelques jours de repos en attendant le grand saut pour l’autre côté de l’Atlantique ! Les préparatifs de la première transatlantique de Watch the Waste débuteront en début de semaine prochaine…

Une très belle année à tous… Boas Festas !

Merci à Dakar et en route pour les iles !

samedi 12 décembre 2009 à 16:48 par Equipe

Quelques lignes à quelques minutes du départ de Dakar, pour informer nos lecteurs du retour sur les flots de l’expédition Watch the Waste.
Après une quinzaine de rencontres, de découvertes et d’actions, le départ du Sénégal est chargé d’émotions tant l’accueil reçu ici nous a touché. Ces quelques lignes pour remercier tous ceux qui ces jours derniers ont croisé les membres de l’équipage. Les souvenirs de ces moments d’Afrique porteront chacun tout au long de l’expédition, d’île en île jusqu’aux Amériques puis jusqu’à l’Europe… Vous retrouverez très bientôt sur notre site de nouveaux articles consacrés à cette escale hors du commun : les déchets de Dakar n’ont pas finit de faire parler d’eux !

Départ imminent pour l’île de Sal, au Cap Vert: 350 milles environ qu’Alcavelis devrait avaler en trois jours maximum ! Une nouvelle balise de suivi GPS a fait son entrée à bord : retrouvez dès à présent en ligne nos positions en temps réel !

Un grand merci à Dakar ! Dernière étape continentale de l’expédition pour l’année 2009. A partir de ce point, l’équipage d’Alcavelis ne touchera de territoires continentaux qu’à l’occasion de son arrivée: fin juin 2010, en Bretagne !

A très vite pour la suite !

La baie de Hann à l’heure de Copenhague…

mardi 08 décembre 2009 à 16:07 par baptiste

En Europe, le sommet de Copenhague s’est ouvert hier matin. A défaut de chefs d’états, l’équipe de Watch the Waste, en escale à Dakar, a rencontré les habitants de la baie de Hann, un des sites qui figure en bonne place dans le classement des plages les plus polluées du monde.

Le pied à peine posé à terre, la situation de la baie de Hann ne peut qu’être confirmée par nos premières sensations. A la lisière de l’eau, le sol est noirci. Des déchets par centaines s’amoncellent sur le sable. Mais surtout, une odeur de vase peu commune est omniprésente aux abords du ponton qui nous amène jusqu’à terre.


La plage de la baie de Hann. Dans le fond, la couleur originelle du sable, au premier plan, le sol noirci par les diverses pollutions qui touchent le site.

Très vite, nous rencontrons Babacar Fall, président de l’association Siggil Hann qui se bat depuis plus de cinq ans pour la restauration de la baie. Les membres de Siggil Hann habitent tous à proximité de la plage. Les plus anciens ont pu assister à la dégradation de leur cadre de vie : « dans les années 60, cette baie était considérée comme la plus belle plage du monde après celle de Rio de Janeiro ». En effet, ce site réunit des qualités exceptionnelles : de grande taille, on y retrouve un sable d’une rare finesse, exposé plein sud, à l’abri des vents et des courants. Mais aujourd’hui, rares sont ceux qui osent s’aventurer dans l’eau. Les quinze kilomètres de plage qui forment la baie sont devenus un des territoires anthropisés les plus pollués de la planète. Chacun semble ici déplorer un véritable gâchis qui s’est joué en moins de cinquante ans.


Rencontre avec Siggil Hann : de gauche à droite: Mame Yabe Diop, Mamadou Bocar Thiam, Baptiste Monsaingeon, Yann Geffriaud, Pape Sylla, Malang Badian (chef de quartier Marinas), Marcel Diatta, Mamadou Diédhiou, Babacar Tambidou, Mbaye Ndiaye, Pierre sassier, Babacar Fall.
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